La culture en ligne consolide sa percée
3 ans après son déclenchement, la pandémie de Covid 19 continue d’impacter fortement les pratiques culturelles, comme l’attestent les résultats de la dernière enquête sur les comportements culturels de la population suisse réalisées par l’agence L’Oeil du Public sur mandat de l’Office fédéral de la Culture (OFC). Ainsi, 53% des personnes interrogées déclarent avoir pris l’habitude de rester à la maison et fréquenter aujourd’hui moins souvent les établissements culturels qu’avant la crise du Covid. La pratique amateure continue elle-aussi de souffrir, 18 % des personnes interrogées déclarant avoir abandonné leur pratique depuis la crise. Un constat peu réjouissant qui vient corroborer, chiffres à l’appui, une tendance observée ces derniers mois de manière empirique par les professionnels de la culture, confrontées à une sous-fréquentation inquiétante de leurs musées, théâtres et salles de spectacles.
Un effet cocooning amplifié par un contexte anxiogène
Les causes de cette sous-fréquentation sont bien-sûr multifactorielles. L’enquête suisse isole néanmoins les plus importantes, et tout particulièrement la persistance de nouvelles habitudes adoptées par la population pendant la crise sanitaire associées à un repli général sur la sphère privée et le domicile. Un effet cocooning renforcé par la démocratisation du travail à domicile et un contexte global plutôt anxiogène (persistante d’une menace sanitaire diffuse, guerre en Ukraine, etc..). Les personnes âgées, les femmes et la population rurale constituent les catégories de population les plus affectées par cette situation.
L’offre culturelle en ligne tire son épingle du jeu
Dans ce contexte morose pour l’offre culturelle in-situ, l’offre culturelle en ligne apparait comme la grande gagnante, et occupe une part toujours croissante dans le panier des produits culturels des Suisses. L’étude suisse avance notamment que « le remplacement du in situ par le web correspond très clairement au repli sur le domicile. L'offre culturelle digitale vient combler, au moins en partie, le besoin de culture des personnes restant maintenant plus volontiers chez elles. On peut donc penser que si cette tendance casanière devait se confirmer ou s'intensifier, le remplacement du in situ par le web pourrait suivre le même chemin ».
Le concert en streaming résiste bien à la réouverture des salles
À la question : « Pendant les 12 derniers mois, quelles activités culturelles avez-vous eues sur le web ? », les réponses données par le graphique suivant sont particulièrement éloquentes :
Le taux de pénétration des films et séries n’étonnera personne. Plus surprenant, les captations de concerts et autres formes de spectacles vivants continuent d’afficher une popularité élevée, étonnamment stable par rapport aux données observées au plus fort de la crise sanitaire quand la plupart des lieux culturels avaient été contraints de fermer leurs portes.
La consolidation d’un nouveau modèle économique
Autre constat de l’étude : La monétisation des offres culturelles en ligne est globalement bien acceptée pour la population, comme l’illustre le graphique suivant qui détaille pour chaque type d’offres culturelles numériques, la proportion des contenu gratuits et payants :
Où il s’avère que près d’un tiers des personnes ayant visionné en ligne des captations de spectacles vivants (toutes formes confondues) ont accepté de payer pour cela. Il aurait été intéressant d’approfondir cette réflexion en interrogeant les modalités de visionnage et en comparant les tarifs proposés en ligne et in-situ. Malheureusement, ces questions sortent du champ de l’enquête qui sert de référence à cet article.
Une dynamique de remplacement se profile ..
Au final, même si l'offre en présentiel reste irremplaçable pour 2 sondés sur 3, il semblerait qu’une dynamique de remplacement de l'offre en présentiel par l'offre numérique s'est mise en place par rapport à la situation qui prévalait avant la crise sanitaire. Un quart des sondés considèrent même que l’offre digitale comble un nouveau besoin, en les affranchissant des contraintes liées aux déplacements, aux horaires, voire aux intempéries. À suivre …
Pour aller plus loin
Cet article se fonde sur les résultats de la dernière enquête sur les comportements culturels de la population suisse réalisée par l’agence L’Oeil du Public (Suisse) sur mandat de l’Office fédéral de la Culture (OFC). Cette enquête fait partie d’un processus de suivi qui a été lancé en juin 2020 avec une première enquête et qui s’est poursuivi avec d’autres enquêtes en septembre 2020 et en avril 2021. La dernière d’entre elles a été menée entre le 26 septembre et le 6 octobre 2022 auprès d’un échantillon représentatif de la population résidante de 1235 personnes, dans l’ensemble du pays. Retrouvez l’étude complète sur le site de l’OFC :
On aimerait penser que la situation suisse est exceptionnelle. Malheureusement, les conclusions de l’enquête suisse sont en phase avec celles d’une étude similaire publiée en juillet 2022 par le Ministère français de la Culture : « les sorties culturelles des français après deux années de Covid-19 ».
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